6 novembre 2024

Draa Nory l’ami qui me manque , Draa Nory le penseur est toujours là ! …Par Ahmed Mehaoudi…

 

                            J’ai gardé le silence pour mieux garder en moi la présence de nory dans ma vie…Les amitiés intimes ont parfois une douleur qui reste muette, ne sachant comment exprimer ce lien profond et plein d’affection..Avant son statut d’artiste-peintre, Nory était un homme , simplement un homme qui passe…il aura vécu non pour se réclamer artiste mais pour défendre une seule chose d’essentiel , vivre dignement…Ayant traversé une existence assez éprouvante , il a appris que les épreuves du quotidien  forge une personnalité , d’autant que cette personnalité à la vocation de penseur

Nory était un grand penseur…Sa rencontre avec l’œuvre de Rimbaud lui a fourni matière à réflexion , un élan  porté vers le futur …Il voyait loin , il  cherchait dans ses visions un monde où les hommes aboliront tout servage , l’affranchissement , de semer le bonheur dans le cœur des êtres , il s’aidait de poésie , d’art plastique , plus encore , il voulait faire du cinéma , il a été au théâtre..Un  musée des œuvres de Nory est une bonne intention mais moi qui le connaissais il se méfiait des panthéons…Il  s’exclamait parfois avec animosité en déclarant «  Mon art est partout , dans la rue , au café , je veux que même les enfants tripotent mes toiles , brisent s’il le faut un cadre mais je veux que les gens soit proche , communie entre eux , d’être un prétexte à la joie de vivre  , partager un café , un rire , un débat d’idées , l’important est demeurer humain , un cœur qui aime les gens , un esprit lucide , un enseignant , un  Maître…Sa disparition est surtout physique , il le répétait souvent , « le jour où je vous quitterais pour toujours , mon absence vous pèsera lourd.. » Il avait vu juste , son départ m’a bouleversé , je m’habitue à aller au café et ne pas le rencontrer  , écouter son humour , son ironie sur les choses de la vie , ses délires , sa pensée lointaine , pourtant cela me manque , en même temps je sens qu’il n’est jamais parti , toujours là…Un musée , on en parlait , du musée du Louvre…Il était plutôt du côtés des peintres « refusées «  , il avait un penchant vers les « impressionnistes »  notamment le vieux PISSARO  qu’il appréciait pour sa générosité humaine et son approche du paysage , surtout aussi Corot où je le vois encore creuser d’esquisse en esquisse l’enseignement de grand peintre , et d’autres dans la même veine …Son admiration pour Vincent Van Gogh  était beaucoup plus orienté  sur la correspondance de Vincent avec son frère Théo…Il avait découvert à travers les lettres de Vincent  la spiritualité dans l’acte de peindre..il prenait conscience que peindre était hautement un acte de penser …Vincent transmettait sa pensée à travers ses toiles..Nory en avait saisi le sens…Il utilisait le langage de la peinture pour transmettre une pensée…Plus tard , sa pensée avait trouvé des mots pour l’exprimer à merveille…Malheureusement , il s’était senti mal compris dans sa propre ville , même qu’il ne fréquentait pas les salons , il vivait son art comme un gagne pain, il trimait , il bossait en simple ouvrier  au milieu des gens humbles  ….Ce musée , s’il en sera un , comme le dit madame Draa sera celui du coin des amis en souvenir à l’ami qu’il fût…Quand à la postérité , il aimait ce passage « Enfance » , tiré des Illuminations  de Rimbaud  « Je suis le piéton de la grand-route par les bois nains ; la rumeur des écluses couvre mes pas. Je vois longtemps la mélancolique lessive d’or du couchant. Je serais bien l’enfant abandonné sur la jetée partie à la haute mer, le petit valet suivant l’allée dont le front touche le ciel. Les sentiers sont âpres. Les monticules se couvrent de genêts. L’air est immobile. Que les oiseaux et les sources sont loin ! Ce ne peut être que la fin du monde, en avançant… » 

C’était poétiquement  la représentation qu’il avait du monde, ajouté à cela sa piété de musulman…On aurait dû mieux  apprécier sa science le long de sa vie et lui donner sa place qu’il méritait sur les bords de la Mekerra…Ce fut fait vers la fin mais c’était fidèle à une tradition de rendre hommage à un artiste quand il nous dit adieu , mais c’était le cours de son destin…Je me devais pour la mémoire de mon ami et frère Draa cette contribution modeste pour évoquer un être qui m’aura toujours ébloui depuis la première fois qu’on s’était rencontré …On avait vingt ans ..!

Lah yerhmek sahbi NORY.. !.

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