lun. Jan 8th, 2024

Abdelhak Kessaïr , le poète de la colline retrouvée…!

La colline , quelques cailloux , un sentier , des buissons , arbres , pâquerettes , violettes rares , un gros rocher comme poste d’observation , le village d’en haut , pistes sinueuses , là haut un gros hameau Faulkner , chemin escarpée pour mes pieds , moi l’habitué de l’asphalte , les petites maisons de pierres , patio à l’odeur mauresque , au coin l’enseigne comme fronton indique une épicerie de Ammi L’haje , puis on voit le haouch , indescriptible , mille styles s’y superposent , Andalousie , Bagdad , Damas , même un air du vieux Paris de Villon , tout se réunit , c’est lui le poète Abdelhak Kessaïr , un ami , un frère , un sahib , je ne sais définir , tout se confond , il est poète , il s’est reconnu poète et Basta!…Nous sommes cinq , six , meïda enrichie à la traditionnelle , qu’avions-nous mangé ? J’ai oublié , seul la senteur des épices me poursuit aujourd’hui…Nous parlions de poésie , lui surtout , aime les concepts , l’idée de poème , le poème-flash , était-il photographe avant l’heure , les rayons de sa bibliothèque font rêver , un peu je songerais à la grande bibliothèque d’Alexandrie , c’est fou comme la jeunesse donne d’autres yeux , des yeux d’ailleurs , il ouvre un recueil de poème , il déclame un poème de Yannis Rítsos :

Il prend dans ses mains des choses disparates — une pierre

une tuile brisée, deux allumettes brûlées,

le clou rouillé du mur d’en face,

la feuille qui est entrée par la fenêtre, les gouttes

qui tombent des pots de fleurs arrosés, les pailles

que le vent d’hier a déposées sur tes cheveux — il les prend

et la- bas, dans la cour, il édifie presque un arbre.

En ce presque réside la poésie. Tu la vois ?…

Les minutes fuient , lentes , nous naviguons immobiles , ce Yannis Rítsos sera encore lu des années plus tard au Cumo , l’université quand elle était poétique , une bohème , une nouba de Grenade , plus rien de tout çà aujourd’hui ….Nous ne pensions pas à la chronologie , les poètes avancent sans calendrier ,comme les pistards du désert , le temps est comme la vie ailleurs , ailleurs à l’épicentre de la réalité des faits , sur le mur une gravure , c’est une sourate du Coran , sa lumière brille , nous parlons je ne sais plus de quoi , surtout moi bavard à loisir ,lui aux aguets ficelle mes délires , mon fleuve inonde , lui le ficelle , deux mots terrible , je devine le visage de Léo Ferré clignant des yeux , ce regard fixé dans sa quadrature , la voix de Ferré l’audio rempli la pièce d’une émotion étrange , avec le temps va , tout s’en va…Abdelhak en coin me jette un regard en hochant la tête , signe que c’est Ferré , et les autres passent en revue , le plus grand Jacques Prévert , lu par Serge Reggiani , les volutes de cigarettes virevoltent dans l’air , le thé tourne les esprit , la petite fenêtre dessine une pleine lune , c’est l’été , les grillons…..

Ahmed  Mehaoudi…